Hiver 1985, Terminator terrorise les festivaliers d’Avoriaz et après Ash dans Alien réveille un peu plus le fantasme de l’homme machine, supposément indestructible et immortel. Si le cinéma s’empare très tôt des cyborgs (Fritz Lang, notamment, dès 1927, avec son Metropolis), les années 1980 marqueraient une sorte d’apogée, entre Terminator, Aliens et Cyborg. Mais quand Paul Verhoeven, cinéaste venu des Pays-Bas, s’attaque à son tour à la machine, c’est pour livrer un brûlot anti-sécuritaire contre l’Amérique de Reagan. Orion Pictures, studio papa de Terminator, compte bien capitaliser sur la créature de chair et de fer de James Cameron et lance assez rapidement une nouvelle entité, RoboCop. Mais le film de Paul Verhoeven se révèle beaucoup plus profond que son illustre aîné et le sujet permet au réalisateur néerlandais de multiplier les axes de réflexion. Dans un Détroit cauchemardesque et replié sur lui-même, en proie aux voyous de la pire espèce d’un côté et aux conglomérats surpuissants de l’autre, RoboCop, figure christique, apparaît comme un sauveur. Il est une sorte de fantasme ultime de tout ministre de l’intérieur et par extension, de tout patron : flic (ou employé) qui ne « mangerait pas et ne dormirait pas » selon un de ses créateurs, malléable à merci, sans mémoire et incapable, a priori, de réflexion (il n’a dans sa base de données que quatre types de situations possibles, dont une cachée). RocoCop est le bras armé idéal du consortium OCP, sorte de créature de Frankenstein qui n’aurait pas totalement échappé à son maître. A travers cet adepte d’une justice expéditive, Verhoeven peut tirer à boulets rouges sur l’obnubilation du pays de l’oncle Sam pour la sécurité, quitte à connaître de sérieux dommages collatéraux (l’ED 209, robot ultra-puissant, tue par erreur un testeur). Aujourd’hui, à la vision du film, ce qui frappe instantanément c’est son incroyable actualité. Car au-delà d’une interprétation musclée (le touchant Peter Weller réussit à donner de l’humanité à son personnage malgré le masque qui lui cache la moitié du visage ; le fou furieux Kurtwood Smith en salaud intégral), d’une réalisation stylée, ultra-violente (on n’a pas vu depuis, une mise à mort aussi violente et rapide d‘un héros) et ultra-réaliste (jamais on n’est tenté de remettre en question ce monde futuriste et ses robots ; RoboCop marchant lentement et pas vraiment à l’aise dans ses mouvements et l’ED 209 incapable de se remettre sur ses pattes une fois par terre), l’aspect prophétique du film nous éclate à la gueule. Détroit en premier lieu qui a subi de plein fouet la crise, est bel et bien devenue une cité touchée par la pauvreté et la violence. D’autre part les médias caricaturés avec violence par le réalisateur, vulgaires et incapables de hiérarchiser ce qu’ils véhiculent (saillie que Verhoeven réitérera dans Starship Troopers en 1997) ressemblent comme deux gouttes d’eau à ce que nous infligent quotidiennement les grandes chaînes de télévision. Mais surtout, les drones qui commencent à pulluler sur le globe pourraient bien préfigurer des monstres mécaniques tandis que, si la fusion homme-machine semble encore lointaine, les progrès de la médecine tendent de plus en plus à créer des membres mécaniques. Visionnaire donc Paul Verhoeven ? Oui, malheureusement. Blu-Ray : Techniquement, c’est bien au-dessus de la précédente version Blu-Ray ou de l’édition DVD. Mais c’est surtout au niveau des bonus que le disque convainc : pas loin de 3 heures de suppléments. Commentaires audio, apparition clin d’œil de Verhoeven dans le film, scènes inédites, featurettes d’époque, reportages sur les méchants (les comédiens reviennent sur la bonne ambiance du tournage et sur la camaraderie qui règnait entre eux), sur les superbes effets spéciaux. Deux gros morceaux : Questions au réalisateur et au scénariste à l’UCLA, où les intervenants brillent par leur humour et leur franchise/ et un making of plutôt complet. RoboCop. Film américain de Paul Verhoeven avec Petter Weller, Kurtwood Smith. SF. 1987. Sortie Blu-Ray et DVD le 05 février 2014. Durée : 01h42. Editeur : MGM.
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